Lors de la présence anglaise, elle s’appelait Market Place (place du marché). Lorsque Calais fut délivrée en 1558, on lui donna le nom de place d’Armes. Dans les villes où séjourne une garnison, c’est là que se déroulent les cérémonies militaires, comme le passage en revue des troupes. On trouve ainsi de nombreux lieux portant ce nom, par exemple à l’intérieur du fort Nieulay. Cette appellation est toujours restée à Calais, malgré plusieurs tentatives de changement.
Les marchés.
Le marché repris après la reconquête de 1558 grâce à l’autorisation donnée dans la charte de François II. Jusqu’en 1939 et en dehors des périodes de guerre, un marché de grande envergure se tenait le mercredi et le samedi Ce marché existe encore de nos jours même s’il n’a retrouvé son ampleur d’autrefois. Aux mêmes jours se tenait le Marché aux Herbes sur une petite place au coin sud-est de la place d’Armes. Le remembrement l’a fait disparaître même si un décrochement dans la ligne des bâtiments en est un témoin.
Les fêtes et les foires.
La place d’Armes accueillait aussi des foires , ainsi celle de fin janvier offrait aux Calaisiens théâtre (comme le théâtre Pigis), jeux d’adresse, prestidigitateurs, ventes de pains d’épices, attractions avec marionnettes, lanternes magiques représentant la passion de Jésus Christ ou encore la tentation de saint Antoine, lutteurs, ours savants, une femme à barbe, une fillette de 70 kg, cuivres et grosses caisses, … La fête connaissait un tel succès que la place devint trop petite , en 1869, elle s’étendait de la rue Royale à la place Richelieu ! La place accueillit aussi le cirque américain ” Bello & Myers ” qui avait une capacité de 4000 spectateurs. Parfois les cirques en bois étaient revendus à la fin de la saison. Un carnaval avait lieu mais il finit par disparaître, ne rencontrant pas le succès escompté
Les boutiques.
Des boutiques de style hétéroclite auxquelles se mêlaient de luxueuses demeures bordaient les quatre côtés. La place avait de ce fait un caractère beaucoup plus convivial qu’à notre époque et elle était attractive de jour comme de nuit. Les rues voisines présentaient une architecture assez variée. Par exemple, la rue de la Citadelle possédait les seules maisons antérieures au XVIIème siècle, appelées “maisons espagnoles” car construites pendant la présence des Espagnols à Calais entre 1596 et 1598, dans un style ressemblant aux habitations à encorbellements de Canterbury.
Un pôle dans la vie de la cité.
L’ancien Calais, avant sa fusion avec Saint-Pierre en 1885, correspondait en gros au Calais-Nord actuel , la place d’Armes en était le centre politique, économique et culturel. Au Moyen age, on exposait à la foule les bandits, malandrins et autres criminels, pieds et mains attachés à un poteau appelé pilori. Un arbre de la liberté fut installé à la Révolution française et l’on y fêta “l’Être suprême.” Jusqu’au milieu du XIXème siècle, on disposa par intermittence une guillotine pour les exécutions capitales même si elle ne servit pas pendant la Révolution. On y célébrait les fêtes, comme la bataille des fleurs en 1906, mais aussi les catastrophes. Le 26 mai 1910, on rendit hommage aux marins victimes du drame du Pluviôse en y faisant passer le cortège long d’un kilomètre, vers l’église Notre-Dame.
La Seconde Guerre mondiale et la reconstruction.
Le quartier, notamment l’ancien hôtel de ville, s’embrasa lors des bombardements de 1940 et l’on reconstruisit au rabais avec force ciment, afin de reloger rapidement le plus de monde possible. Les avis divergent donc quant à l’esthétique de ces bâtiments. Seule la tour du guet survécut miraculeusement aux flammes. Elle témoigne d’une richesse architecturale aujourd’hui presque disparue. Si la place d’Armes n’est plus le théâtre de toute la vie de la cité, la tour du Guet reste néanmoins le témoin attachant d’une époque rythmée par le marché et les défilés militaires.
Le Poids de la Dame.
Il s’agissait d’une halle aux marchands édifiée en 1196, contre la tour du Guet, et qui s’étendait jusqu’à la place du marché aux herbes. Elle fut détruite en 1658.
- Le grand marché. (cf. illustration ci-dessous)
On trouvait sur le grand marché les produits de saison que venaient vendre les fermiers des alentours : légumes, beurre, œufs, confitures ou encore fleurs, poulets, canards, oies, pigeons, lapins vendus vivants pour preuve de leur fraîcheur, …
- Le marché aux herbes. (cf. illustration ci-dessous)
Il n’était pas fréquenté par tous les commerçants mais exclusivement réservé aux maraîchers même si les marchands de poisson pouvaient aussi s’y installer. On y vendait, entre autres, cresson, cerfeuil et pourpier, d’où le nom de “Marché aux Herbes”. - Le kiosque à musique et réseau de tramways. (cf. illustration ci-dessous)
Le kiosque offrait aux passants des concerts entre deux airs de carillon. Les tramways de la ligne place d’Armes – cimetière sud, arrivant par la rue du Havre, font demi-tour par le boulevard International avant de regagner la place par la rue de la mer. Ils ont été électrifiés en 1908, auparavant, ils étaient tirés par des chevaux.
4. Les commerces. (cf. illustration ci-dessus)
Déjà à l’époque, les Anglais venaient nombreux à Calais, c’est pourquoi beaucoup de commerces étaient tournés vers le tourisme. On trouvait donc nombre de magasins de souvenirs et de change, mais aussi cafetiers, bouchers, bijoutiers, coiffeurs, épiciers, restaurateurs, charcutiers, pharmaciens, merciers, boutiques de fruits et légumes, marchands de meubles, facteurs de pianos et bien d’autres encore, qui assuraient aux Calaisiens tout ce dont ils avaient besoin. (Voir les légendes sur l’image agrandie)
5. La tour du Guet. (cf. illustration ci-dessus)
Sa construction, qui daterait du milieu ou de la fin du XIIIème siècle, en fait le plus ancien vestige de la place d’Armes. Elle servait à surveiller les vaisseaux en mer et à avertir de l’approche d’ennemis. Un des deux guetteurs signalait aussi les foyers d’incendies. A la vue du feu, il descendait prévenir le corps de garde, sonnait le tocsin et annonçait dans un porte-voix l’endroit d’où les flammes s’élevaient. Enfin, la vigie devait avertir de l’ouverture des portes de la ville par cinq coups de cloche. Ils donnaient trois coups toutes les trois heures et appelaient les habitants à la retraite. Le moindre défaut de la part des observateurs pouvait leur valoir la prison. La face nord accueillait également un jacquemart qui, lors des heures, demies et quarts d’heure symbolisait un combat équestre dont on disait qu’il s’agissait de François Ier et Henry VIII. La tour servit aussi de relais télégraphique, avec l’installation d’un appareil “Système Chappe” en 1816. A son pied, on a déposé l’ancienne cloche datant de 1770 qui sonnait le tocsin et les heures.
6. L’hôtel de ville devenu ensuite musée. (cf. illustration ci-dessus)
Il avait été édifié pendant la période anglaise et possédait un beffroi modifié en 1609. Celuici symbolisait la liberté de la ville, les privilèges et les pouvoirs de la commune contenus dans la charte de coutumes. Plus il était haut, plus la symbolique était forte : il s’agissait de la volonté de montrer le pouvoir de la ville par rapport à tous les autres pouvoirs. Pendant la période anglaise, le beffroi servait aux directeurs de l’étape des laines qui y tenaient leurs assemblées. L’hôtel de ville tenait lieu de palais de justice, de tribunal ou encore de chambre de commerce. L’ensemble avait été reconstruit en 1740 et comportait quatre niveaux dont un beffroi octogonal de trois niveaux. Deux de ses côtés (vers la place depuis 1821 et vers la rue de la Citadelle à partir de 1863) étaient pourvus d’une horloge. Il contenait l’unique exemplaire des anciens carillons de la Flandre française qui, de 1775 à 1834, jouait chaque heure l’air de “Gentille Annette” de Boieldieu. Trois ans après la fusion des deux villes, on décide la construction d’un hôtel de ville central sur la plaine dite du Sahara. Le 10 février 1892, on choisit de transformer l’ancien hôtel de ville, demeuré sans affectation précise depuis 1885, en musée. On construisit alors une verrière sur le toit du bâtiment. Les collections qu’il abritait étaient précieuses et l’origine de certaines pièces remonterait à l’Egypte antique ! Celles-ci, qui avaient été préservées lors de la Première Guerre mondiale, n’échappèrent pas à la Seconde. L’hôtel de ville possédait aussi une bibliothèque au deuxième étage. Mais considérée comme “trop haute” et pas assez pratique pour attraper les ouvrages, elle était peu fréquentée. Au lendemain de la Libération, il ne restait donc que les ruines du musée. Son classement en tant que monument historique fut refusé par l’État et il fut rasé. Des recherches géophysiques récentes de M. Frosche et M. Camerlynck ont été réalisées à la demande de l’Association pour la Mise en Valeur du Patrimoine Architectural du Calaisis. Elles ont confirmé que l’ancien hôtel de ville se situait à l‘ouest de la place, vers la fromagerie, à cheval sur le trottoir et la route. La crypte du bâtiment se trouverait actuellement sous la route…